L’assurance de responsabilité des dirigeants

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Le dirigeant doit faire face à de nombreux risques dans l’exercice de ses fonctions. Les risques liés à la responsabilité sont en hausses ces dernières années et continuent d’augmenter: les obligations sont de plus en plus lourdes, la réglementation d’avantage plus complexe, les juges et les autorités administratives font preuve d’une grande rigueur et les associés ou les actionnaires sont de plus en plus exigeants.

Chaque jour, la responsabilité personnelle du dirigeant peut être recherchée par ses associés, ses salariés ou tout tiers ayant subi un préjudice, même si ces fautes de gestion ne proviennent pas du dirigeant, et ont été commises par ses coadministrateurs. La responsabilité du dirigeant peut être mise en œuvre sur le plan civil ou le plan pénal. La responsabilité pénale sert à réprimer. La responsabilité civile, quant à elle, permet de réparer un préjudice. Une même infraction peut entraîner simultanément la responsabilité pénale et civile du dirigeant. Les dirigeants de fait risquent les mêmes sanctions et responsabilités que les dirigeants de droit.

Les principaux motifs de la mise en œuvre de la responsabilité du dirigeant sont :

  • Action en complément de Passif. Suite à une erreur de gestion (de droit ou de fait) entrainant la liquidation de la société, un dirigeant peut être condamné à payer sur ses biens propres, tout ou une partie du passif.
  • Inobservation des dispositions légales ou réglementaires, dans tous les domaines, social, fiscal, droit de la concurrence, atteinte à l’environnement, etc.
  • Violation des statuts de la société, comme le non-respect des convocations aux Assemblées Générales, absence de rapport de la gérance, etc.

Les conséquences de ces mise en cause sont parfois très lourdes et peuvent même impacter la sphère personnelle du dirigeant et de ce fait mettre en péril son patrimoine privé, sa réputation et aussi ceux de ses proches.

Force est de constater qu’en pratique les réclamations à l’encontre des dirigeants tendent à se multiplier. Ce phénomène s’explique notamment par une volonté politique de responsabilisation des dirigeants suite à plusieurs scandales qui ont marqué les esprits, par l’émergence de nombreux mouvements de défense d’intérêts collectifs et par une prise de conscience générale, notamment par le biais des médias.

Le droit français fait distinctement la différence entre les risques encourus directement par une entreprise ou une association, et ceux encourus, à titre personnel, par leur dirigeant (de droit ou de fait), bien que ce dernier ait agi dans l’exercice de ses fonctions.

Le dirigeant se retrouve donc seul pour assurer sa défense au civil comme au pénal le cas échéant, et en payer les frais. S’il est reconnu responsable au civil, il devra assumer seul encore la charge des dommages et intérêts en prélevant sur son patrimoine personnel.

Les garanties

L’assurance Responsabilité des Dirigeants, également appelée assurance ‘D&O’, protège le dirigeant contre les éventuelles réclamations d’actionnaires, d’employés, de clients ainsi que contre les poursuites d’autorités judiciaires ou administratives menées à l’encontre du dirigeant en raison de faits relatifs à sa fonction.

Les infractions au Code du Travail, au fisc, les fautes inexcusables sont jugées selon le Code Pénal. L’assurance ‘D&O’ est une notion plus large, qui va au-delà de la responsabilité civile et qui inclut les dirigeants de fait. Elle couvre principalement les frais de défense exposés devant toute juridiction ou toute autorité administrative. Elle prend aussi en charge les conséquences pécuniaires résultant de la mise en jeu de la responsabilité civile des dirigeants sociaux désignés dans le contrat qui encourent dans l’exercice de leurs fonctions les fautes commises à l’égard des tiers.

L’assurance responsabilité du dirigeant garantit les dirigeants pour :

  • les moyens financiers d’une défense efficace au civil et au pénal lors de la mise en cause ;
  • la prise en charge des dommages et intérêts (mais pas des amendes pénales ni des cautionnements) si l’assuré est condamné au civil ;
  • les frais de reconstitution d’image et de gestion de crise au sein de l’entreprise.

Bon à savoir: la loi autorise une entreprise ou une association à souscrire et à payer sur son propre budget une garantie d’assurance spécifique pour le compte de ses dirigeants de droit ou de fait.

L’objectif de l’Assurance ‘D&O’ est essentiellement de protéger le patrimoine privé des personnes physiques qui exercent une fonction de dirigeant et qui voient leur responsabilité mise en cause en cette qualité. Face à la multiplication des réclamations, la couverture ‘D&O’ s’avère être un mécanisme de protection indispensable pour les dirigeants.

Lorsque le dirigeant est confronté à la réclamation d’un tiers ou à des poursuites, cela peut représenter un processus long et coûteux. L’assurance ‘D&O’ prend en charge tant les frais de défense (frais d’avocats, d’experts,…) que les montants d’éventuelles condamnations.

Bien souvent, cette assurance offre une couverture étendue dans le temps car les dirigeants sont couverts :

  • après leur départ de l’entreprise pour des actes de gestion antérieurs à celui-ci ;
  • pendant 3 ans après la fin du contrat pour des actes de gestion antérieurs (garantie subséquente);
  • pour l’ensemble des actes réalisés avant la mise en place du contrat, si la réclamation intervient après la souscription.

Il est donc judicieux de songer à contracter une assurance de responsabilité du dirigeant d’entreprise. Elle est généralement proposée dans un contrat distinct. Un bon niveau de couverture passe par une couverture conjointe d’un contrat de responsabilité civile du mandataire sociale et d’un contrat de protection juridique du mandataire social.

La plupart des grands groupes ont souscrit à ce type de garanties pour leurs dirigeants mandataires sociaux. Les PME, PMI et autres mandataires sociaux, sont très peu à souscrire à ce type d’assurance bien qu’elle soit fortement recommandée.

Les dirigeants concernés

Le terme « dirigeant », fait référence à tous les mandataires sociaux régulièrement nommé à des fonctions de Direction au sens large, c’est-à-dire les membres du conseil d’administration, du conseil de surveillance, du directoire, et le directeur général. Les dirigeants de fait sont également pris en compte pour les activités où leur responsabilité les met en position de direction (un directeur financier qui est administrateur d’une filiale du groupe, par exemple).

Des délégations de pouvoir formelles peuvent être signées par le dirigeant au bénéfice d’un cadre. Il s’agit alors d’un véritable mandat.

Dans les contrats d’assurance, le périmètre des assurés est plus large : les mandataires ou dirigeants sont considérés comme tiers entre eux en cas de conflit d’intérêt aboutissant à la mise en cause de l’un d’entre eux par les autres mandataires. Par ailleurs, les conjoints et héritiers bénéficient aussi de la garantie.

Dans une assurance ‘D&O’, la responsabilité des administrateurs, des gérants et, de manière générale, de toutes les personnes exerçant des activités de management ou de supervision, est couverte. Il est possible de choisir le montant de garantie de l’assuré.

Bon à savoir : l’entreprise peut également demander une extension de la garantie au domaine fiscal ou social.

Ceux qui peuvent exercer un recours contre un dirigeant

Toute personne physique ou morale qui pense avoir subi un préjudice suite à une décision prise par un dirigeant, et de ce fait peut intenter, à tort ou à raison une action en Responsabilité, contre ce dirigeant.

Néanmoins, cela peut être aussi un actionnaire, un autre dirigeant, un salarié, un associé, un créancier, un concurrent, un consommateur, une administration, etc.

Responsabilité pénale du dirigeant

La responsabilité pénale du dirigeant sera engagée même s’il n’a pas participé personnellement à l’infraction et même s’il n’y a pas de préjudice. Il suffit qu’il y ait infraction à un texte pénal.

Le dirigeant peut s’exempter de cette responsabilité dans les cas suivants :

  • Il prouve qu’il n’était pas en mesure d’influencer le comportement de l’auteur de l’infraction. Exemple: accident causé par un chauffeur alors que l’entreprise ne lui avait imposé aucun délai impératif de livraison, que le temps réglementaire de conduite n’avait pas été dépassé.
  • En déléguant ses pouvoirs à une personne (un salarié par exemple), pourvue de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires pour faire respecter la réglementation. Cette délégation ne doit pas être ambiguë. Selon le ministre du Travail, les délégations de pouvoirs ne se justifient que dans les grandes entreprises et non dans les petites entreprises notamment celles présentant un caractère artisanal.

A noter : un arrêt de la Cour de cassation du 13 juin 2012 précise que la délégation de pouvoir accordée à une personne frappée d’une interdiction de gérer n’exonère pas le dirigeant de sa responsabilité pénale.

Qui peut avoir recours à sa responsabilité ?

L’action pénale est toujours engagée par le ministère public (magistrat représentant l’Etat). Parallèlement, les victimes (associés, tiers) peuvent se « constituer partie civile », c’est-à-dire demander réparation d’un dommage auprès d’une juridiction répressive.

Les tribunaux compétents sont le tribunal de police ou correctionnel, la cour d’assises, etc.

Quelles sont les infractions ?

  • Infractions propres à l’activité spéciale de l’entreprise.
    Ex. : transport routier, industrie alimentaire, débit de boissons, BTP, etc.
  • Infractions à la réglementation générale. Exemple: réglementation du travail, fiscalité, douanes, lutte contre la pollution, code de la route, non-respect des formalités de la vie sociale, abus de biens sociaux, vol, etc.

La plupart des infractions pénales sont sanctionnées par des peines de prison ou des amendes.

Responsabilité pénale des personnes morales

Une personne morale (société civile ou commerciale, association, GIE, collectivités territoriales, etc.) peut être condamnée au pénale lorsqu’une infraction a été commise pour son compte par l’un de ses organes de direction ou par toute personne au titre d’une délégation de pouvoir.

Sa responsabilité peut être engagée même si le texte prévoyant l’infraction ne l’envisage pas expressément. Le comité d’entreprise doit être informé des poursuites pénales engagées contre la société.

Les sanctions sont bien sûr adaptées : dissolution de la société, interdiction de faire appel public à l’épargne, d’exercer certaines activités. Le plafond maximum des amendes est 5 fois supérieur à celui applicable aux personnes physiques.

Chaque groupement est doté d’un casier judiciaire qui récapitule l’ensemble de ses condamnations. Il peut être obtenu par certains organismes comme l’Autorité des marchés financiers (AMF) ou l’administration et les collectivités locales.

La responsabilité des personnes morales n’exclut pas pour autant celle du chef d’entreprise qui peut être prononcée pour une même infraction.

Responsabilité civile du dirigeant

La responsabilité du dirigeant sera engagée s’il est prouvé qu’il a commis une faute dont le préjudice est réparable. Si plusieurs dirigeants ont participé à l’infraction, leur responsabilité solidaire sera engagée. Le tribunal déterminera la part contributive de chacun dans la réparation du dommage.

Qui peut avoir recours à sa responsabilité ?

L’action en responsabilité civile peut être engagée comme suit :

  • par un associé ou un tiers ayant subi personnellement un dommage (action individuelle),
  • ou lorsqu’il s’agit de réparer un préjudice subi par la société (action sociale) : un associé agissant individuellement,  des associés représentant au moins 10 % du capital, des créanciers dans le cadre d’une procédure collective.

Tribunaux compétents : tribunal d’instance, de grande instance, de commerce.

Quelles sont les infractions ?

  1. Infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables à l’entreprise
  2. Violation des statuts. Le dirigeant n’a pas respecté une clause des statuts de l’entreprise.
  3. Fautes de gestion. La notion de faute de gestion, créée par la jurisprudence, est très vaste et peut aller de la simple imprudence, négligence (oublier de réunir une assemblée, doter la société d’un capital social manifestement insuffisant au regard de ses besoins au démarrage), aux manœuvres frauduleuses (détourner les fonds par exemple).
    Une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif peut entraîner la condamnation du dirigeant à payer tout ou partie des dettes de l’entreprise : il s’agit de l’action en comblement du passif social. Mais, le tribunal de commerce peut étendre une procédure collective touchant l’entreprise à son dirigeant, dans le cas où celui-ci a confondu son patrimoine avec celui de la société ou si la société qu’il dirige est fictive.
  4. Infractions aux obligations fiscales. En principe, le dirigeant ne répond pas personnellement des impôts dus par la société. Sauf si leur paiement a été rendu impossible par « ses manoeuvres frauduleuses ou par ses inobservations graves et répétées des obligations fiscales ». Exemple: minoration des déclarations de TVA, défaut de paiement des taxes pendant une longue période.
  5. Infractions aux obligations sociales. Si la société ne paye pas les cotisations de sécurité sociale, le dirigeant peut être condamné à verser des pénalités (éventuellement des dommages et intérêts pour le préjudice qu’il a pu causer à la caisse de sécurité sociale). Mais il n’a pas, en principe, à verser le montant des cotisations et des majorations de retard dont le paiement n’incombe qu’à la société.
  6. Infractions aux règles de concurrence. L’associé d’une Société à Responsabilité Limitée (SARL) peut exercer une activité concurrente de celle de la société sans informer celle-ci mais il doit s’abstenir d’actes de concurrence déloyale. En revanche, l’obligation de loyauté et de fidélité qui pèse sur lui en sa qualité de gérant lui interdit de négocier, en qualité de gérant d’une autre société, un marché dans le même domaine. Arrêt de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 15 novembre.